Dimitri Tsygalnitzky : « 2021 sera l’année du MaaS »  

 

Le vice-président de Free Now For Business a répondu à nos questions pour ces sixièmes « Entretiens de l’AFTM ». Voici quelques-unes de ses citations les plus marquantes.  
 

Quelle activité en 2020 ?

« On est à moins 40% depuis le début de l’année par rapport à l’année dernière car on est un peu moins dépendant que le reste de l’industrie au voyage au sens large. Moins de 20% de nos courses en temps normal (5% aujourd’hui) concernent des trajets vers ou depuis les aéroports ou gares. En revanche, le couvre-feu ne nous arrange pas, car 40% de nos courses s’effectuent entre 21h et 6h du matin. » 
 

Quels protocoles sanitaires ? 

« Nous avons 25 000 chauffeurs sur la France, 20 000 ont été équipés de vitres de protection. On limite les courses à 3 passagers maximum, donc pas de passager à l’avant, 3 passagers qui se connaissent bien sûr. Je remarque que nous avons eu d’ailleurs pas mal de nouveaux utilisateurs ces derniers mois, des habitués des transports publics qui ont été rassurés par nos mesures d’hygiène. » 
 

La crise a-t-elle impactée les prix ?

« Le prix de course moyen est normalement d’une vingtaine d’euros, il tourne aujourd’hui autour de 17 euros. Je précise que notre temps moyen d’attente est aujourd’hui de trois minutes, c’est très positif. »
 

Quelles prévisions pour 2021 ?

« Il n’y a que deux types de plan, les mauvais et les chanceux. C’est particulièrement vrai en cette période. Mais on prévoit néanmoins un début d’année très soft avant une accélération au printemps. »
 

Pourquoi ce passage sous la bannière Free Now ?

« Nos deux actionnaires, BMW et Daimler, ont souhaité faire converger toutes les entités au sein d’une même application, Free Now, et d’une même équipe. La France était la dernière étape, réalisée le 15 septembre dernier. »
 

Ce passage modifie-t-il l’offre « affaires » ? 

« Avec Free Now, on ajoute deux avantages : la couverture géographique car on est présent dans plus de 100 villes à travers 10 pays en Europe sur la même application, et on double nos équipes de développeurs, on va donc apporter plus de bénéfices pour les voyageurs et les travel managers. Ce qui ne change pas pour nos 3500 entreprises clientes en France : des tarifs compétitifs, un temps d’attente le plus réduit possible, la qualité de service. »
 

Free Now bientôt racheté par Uber ?

« Ce qui est public, c’est que Uber s’intéresse au leader européen mais les deux actionnaires de Free Now ne sont pas alignés sur la marche à suivre. Ce que je peux dire, c’est que c’est un marché très compétitif, évalué à 300 milliards d’euros (630 milliards d’euros pour le marché aérien), forcément tout le monde s’intéresse à ce marché de la mobilité, et cela semble logique que plusieurs acteurs souhaitent se consolider sur ce marché. Je pense que Free Now va conforter ses positions dans les années à venir, soit en rachetant un concurrent, soit en faisant une levée de fond, soit en s’associant avec d’autres acteurs, soit en se faisant racheter. Mais Uber a déjà des parts de marché importantes et pourrait se retrouver en situation de monopole. Bref, je ne pense pas qu’il se passe beaucoup de choses dans les 18 à 24 mois qui viennent. »
 

Des objectifs de rentabilité reportés à cause de la crise ? 

« On passe d’un marché en recherche d’hyper-croissance à un marché en quête de rentabilité. Les investisseurs attendent désormais un retour sur investissement et notre objectif est d’être rentable dès l’année prochaine, en 2021. »
 

Quels changements à plus long terme le Covid a-t-il sur votre activité ?

« On a publié un livre blanc il y a quelques semaines, 3 tendances :

  • Accentuation du duty of care. 46% des collaborateurs ne veulent plus prendre les transports en commun et un certain nombre de travel managers veulent interdire les transports publics. 
  • Convergence entre le fleet management et le travel management. 
  • Tout le monde est à la recherche de trésorerie, il faut donc offrir une flexibilité de paiement. »

 

Quelle stratégie sur le MaaS* ? 

« La force du MaaS, c’est de pouvoir comparer différents choix de mobilité en termes de prix, de temps de trajet et d’attente sur une même interface. Le graal de tous les acteurs : pouvoir comparer et payer. Donc, pour un travel manager, il s’agira demain de gérer sa flotte automobile, son programme travel, le Pass Navigo des collaborateurs, leurs cartes essence…, dans des packs de mobilité par abonnement sur une même application. Il reste encore du chemin à parcourir mais je suis persuadé que 2021 sera l’année du MaaS ! »
 

Quels enjeux écologiques ?

« Notre ambition est de réduire de 50% par passager/km notre empreinte carbone dans les 4 ans qui viennent. On veut une flotte à 50% électrique dans les 4 ans et 100% d’ici 2030 (aujourd’hui 10%). 
On aimerait aussi proposer et promouvoir une alternative à la voiture pour 50% de nos trajets les plus courts, entre un et trois km. »
 
François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM
*MaaS : acronyme signifiant mobility as a service, il s’agit d’une application mulmodale d’information et de paiement qui permet d’avoir accès à tous les modes de transport d’un territoire en un seul clic.   

Frédéric Gossot : « les prix vont inévitablement baisser »

Frédéric Gossot : « les prix vont inévitablement baisser »

Le directeur général pour la France et le Bénélux de Qatar Airways s’est prêté à l’exercice de l’interview pour ces deuxièmes « Entretiens de l’AFTM ». Voici quelques-unes de ses citations les plus marquantes.
L’avenir du transport aérien
« C’est difficile d’être optimiste en ce moment, le transport aérien traverse une crise sans précédent. Personne ne pouvait s’attendre à une crise de cette ampleur, qui est terrible pour l’ensemble des compagnies aériennes. »
Qatar Airways pendant la crise
« Nous avons fait le choix fort de maintenir une trentaine de destinations au plus fort de la crise, dont Paris, et de mettre en place plus de 300 vols spéciaux. Cela nous a permis de rapatrier 1,8 million de passagers. »
Quel trafic aujourd’hui ?
« La part du trafic affaires est réduite mais pas négligeable pour autant. On a désormais 11 vols hebdomadaires au départ de Paris, on monte à deux vols quotidiens en août et on retrouvera nos trois vols quotidiens en septembre. On fonde beaucoup d’espoir sur la rentrée car un certain nombre de pays lèvent les restrictions à l’entrée et nos clients affaires n’attendent qu’une chose, reprendre l’avion pour signer des contrats, visiter un chantier… ».
Quid de Lyon ?
« Le lancement de la desserte lyonnaise était prévu en juin, nous l’avons reporté sine die. Les ventes étaient extrêmement encourageantes, la région de Lyon a un potentiel exceptionnel. Par ailleurs, nous avons suspendu la desserte de Nice mais l’objectif est de la reprendre dès la fin octobre. »
Quels protocoles sanitaires
« Parmi les mesures les plus importantes, les clients sont invités à porter un masque et une visière, on leur fournit le matériel à l’enregistrement s’ils n’en disposent pas. Et nous avons modifié la restauration à bord en classe affaires : le plateau a remplacé le service à la carte. Mais aussi désinfection totale des avions à chaque escale, embarquement et débarquement cadencés… Compte tenu des remplissages plus faibles, il n’y a pas de temps d’attente supplémentaire. »
A quels prix ?
« Inévitablement les prix vont baisser car la demande est faible. C’est la logique du yield management. Et pour inciter les clients à voyager, nous allons lancer des offres tarifaires intéressantes, comme c’est le cas depuis 15 jours et qui reçoivent un écho favorable de la part des clients. On espère tous retrouver des niveaux tarifaires d’avant-crise mais je ne suis pas convaincu que les prix augmentent. »
A quelles conditions commerciales ?
« Nous avons eu dès le début de la crise une politique commerciale très souple qui a autorisé les remboursements pour ne pas ajouter une crise à la crise. On maintient cette politique de flexibilité pour des voyages jusqu’au 31 décembre : en cas d’annulation, remboursement du billet ou avoir ou report sans frais. »
François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM