Les entreprises tricolores restent attachées aux échanges en présentiel et certaines freinent même des quatre fers sur le télétravail.
Enfin une étude sérieuse sur les réunions à distance ! Parue début octobre et réalisée par l’Insee auprès d’un échantillon de 12500 entreprises de plus de 10 personnes implantées en France, elle vient battre en brèche quelques certitudes.
Premier constat : « en 2022, 44% des entreprises françaises organisent des réunions à distance via internet », observe l’Institut national de la statistique et des études économiques. « C’est moins que dans l’ensemble de l’Union européenne (50 %), où les pratiques sont toutefois hétérogènes : plus de trois entreprises sur quatre des pays nordiques (Suède, Finlande et Danemark, de 78 à 79 %) organisent des réunions à distance, mais moins d’un tiers en Bulgarie, Hongrie et Grèce (de 28 à 33 %). »
Ce sont les PME de moins de 50 personnes qui renâclent le plus à l’exercice, elles ne sont que 38% à y avoir recours régulièrement contre 44% de leurs homologues européennes. En revanche les entreprises françaises de plus de 250 personnes en sont autant adeptes que leurs alter ego continentales.
Les secteurs d’activité les moins fervents sont la construction, le transport et l’entreposage, la production et la distribution d’énergie, d’eau, la gestion des déchets et la dépollution.
La France championne des freins aux voyages d’affaires !
Deuxième constat, qui pourrait en étonner certains : « En 2022, parmi les entreprises qui organisent des réunions à distance, près de deux sur trois (64 %) en France donnent des directives pour privilégier ce type de réunions plutôt que les déplacements, soit 1,5 fois plus que dans l’Union européenne (44 %). Les entreprises françaises sont parmi celles qui les encouragent le plus en Europe avec la Roumanie, Chypre, l’Espagne et le Portugal (de 61 à 70 %). » Et l’Insee de préciser : « L’écart avec l’Union européenne reste important quelle que soit la taille des entreprises (+16 points au moins). » Une preuve chiffrée que les entreprises françaises incitent davantage que les entreprises européennes à limiter les déplacements professionnels !
Troisième constat : si les réunions à distance sont moins fréquentes en France que dans le reste de l’Europe, les entreprises tricolores équipent en revanche mieux leurs salariés pour le télétravail : « 65% d’entre elles fournissent à au moins une partie de leurs salariés un accès à distance à l’ensemble des outils professionnels (messagerie, documents et logiciels), contre 57 % dans l’Union européenne. »
Si le télétravail est entré dans les mœurs, les Français restent donc les champions d’Europe de la présence au bureau confirme un article récent des Echos qui cite une étude du cabinet conseil en immobilier JLL. Selon cette dernière, les Français sont en présentiels 3,5 jours par semaine en moyenne contre (dans l’ordre) 3 jours pour les Suisses, 2,6 jours pour les Britanniques et 2,5 jours pour les Espagnols.
Télétravail : le début d’un reflux ?
Des chiffres qui montrent, d’après un autre article des Echos, « que les dirigeants et les DRH reconnaissent sans peine tâtonner encore sur les avantages et les inconvénients du travail à distance. » Le quotidien économique raconte ainsi que le groupe Amadeus (bien connu des membres de l’AFTM) «tente de faire revenir ses salariés au bureau ». En effet, « 65% des 4200 collaborateurs sont en télétravail trois jours par semaine, ce qui peut poser certains problèmes. » La solution ? « Le groupe a donc mis en place un programme d’incitation pour ramener le pourcentage de télétravailleurs à 50 %, notamment en organisant des « événements festifs » entre collègues. »
Aux Etats-Unis, l’atterrissage est beaucoup plus brutal et certains secteurs veulent que leurs employés reviennent au bureau, parfois sous peine de sanctions. Amazon vient ainsi d’autoriser ses managers à licencier les employés qui ne viennent pas sur site au moins 3 jours par semaine !
Le Figaro annonce même la fin du télétravail dans le secteur qui l’a popularisé : la tech américaine. Amazon donc mais aussi Google, Meta, Apple, Tesla… Elles en reviennent toutes ! Le Pdg de Meta, Mark Zuckerberg, grand promoteur du télétravail, déclare finalement que le présentiel et « que les relations en personne nous aident à travailler plus efficacement. »
Sam Altman, l’inventeur de Chat GPT, parle du télétravail comme « l’une des pires erreurs de l’industrie de la tech. » Même le Pdg de Zoom, Eric Yuan, affirme « qu’il est simplement impossible d’avoir une bonne conversation lors des réunions à distance. » Un comble !
Est-ce le signe d’une inversion de tendances ? Les adversaires du télétravail peuvent toujours rêver : un sondage réalisé début octobre auprès de 470 jeunes diplômés d’écoles de commerce et d’ingénieur par l’Institut Bona Fidé et relayé par Les Echos révèle que trois quarts d’entre eux souhaitent une extension du travail à distance. Il va donc sans doute falloir faire avec !
François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM