Écoblanchiment : ça se corse

Le greenwashing des fournisseurs de voyages peut mettre en péril les objectifs de durabilité des acheteurs et des travel managers. 

L’étau se resserre. Ces derniers mois, les associations de défense de l’environnement et les divers groupes de pression ont multiplié les actions juridiques à l’encontre des compagnies aériennes notamment pour dénoncer leur écoblanchiment, c’est-à-dire les fausses affirmations de durabilité. 

Dans leur viseur particulièrement, la publicité qui est faite vantant les mérites de la compensation et l’utilisation des carburants durables d’aviation (les SAF), comme le relate un très bon article de Business Travel News Europe.

Aux quatre coins de l’Europe, des décisions juridiques pour écoblanchiment commencent à être prises à l’encontre des compagnies aériennes. Deux nouvelles directives européennes, l’une baptisée « Empowering Consumers » et l’autre « Green Claims » qui visent toutes les deux à interdire les allégations écologiques non fondées (mais qui doivent suivre tout un processus législatif avant d’être adoptées et approuvées), pourraient compliquer la vie de ces transporteurs. Et promettent de belles batailles d’avocats.

Ainsi, selon Constantin Eikel, avocat associé chez Bird & Bird, interrogé par l’auteur de l’article, la première directive prévoit « l’interdiction d’affirmer, dans le cadre d’une relation entreprise-consommateur, qu’un produit est neutre en carbone sur la base d’une compensation. » 

Un autre avocat confirme : « toute affirmation de neutralité basée uniquement sur des compensations sera très rapidement qualifiée d’allégation de pacotille. » 

Reprise d’infos risquée

Les SAF sont aussi sur la sellette. Certaines associations sont très remontés contre le terme et parlent plutôt de « biocarburants qui présentent de nombreuses limites ». C. Eikel parie que le terme fera l’objet d’un litige au cours des deux prochaines années afin de déterminer s’il équivaut à de l’écoblanchiment.

Même John Harvey, directeur d’une société de conseil en voyages et fervent défenseur des SAF, déclare à BTN : « Je n’aime pas le terme SAF, je préférerais « carburant d’aviation dé-fossilisé » qui est une description bien plus précise. »

Juristes et experts du voyages mettent en garde les travel managers sur la reprise de ces allégations non fondées dans leurs propres reportings alors que se met en place une autre directive européenne, la fameuse CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive). C. Eikel prévient : « L’entreprise est responsable même si c’est la compagnie aérienne ou un autre fournisseur qui a déclaré à tort qu’il consommait 20% de carbone en moins. » 

Ami Taylor, consultante associée chez Festive Road, prévient que l’écoblanchiment est un sujet complexe que les travel managers ne peuvent traiter seuls et leur conseille de s’entourer d’experts. Si la CSRD est encore entourée d’incertitudes, une chose est sûre : les avocats, juristes et autres consultants se frottent déjà les mains de sa mise en œuvre.

François-Xavier Izenic, rédacteur associé de l’AFTM

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